jeudi 20 octobre 2011

La meilleure réponse

--Papa, pourquoi est-ce que je dois apprendre à lire?
[...]
--D'abord, ma grande, il faut apprendre à lire pour être libre. Ce que ça veut dire? Qu'en ce moment, tu dépends de moi. Et des autres. Je peux prendre un de tes livres, en modifier l'histoire, changer les dialogues et travestir la fin, tu ne le sauras jamais. En sachant lire, tu pourras savoir si on te ment. Tu pourras vérifier par toi-même. Tu pourras aussi lire ce que tu veux, pas ce que les autres décident à ta place.
Et puis, tu ne seras plus jamais seule. Tu auras toujours les livres pour te tenir compagnie, pour te raconter des histoires si tu t'ennuies. Qu'est-ce que je fais des films et de la télé? C'est pas pareil, ma belle. Avec les livres, tu participes. Si je te dis qu'il y a un château, tu le construis dans ta tête, tu choisis comment le décorer. Dans un film, le réalisateur te le montre, c'est lui qui décide de tout. Dans le livre, tu fais partie de l'histoire, tu n'es plus seule : l'auteur, les personnages et toi, vous faites équipe. Les livres sont un peu des amis.
--Pourquoi devrais-je lire?
--Pour ne pas te contenter de survivre.
[...]
Je pense à l'effort qu'on déploie pour accomplir quelque chose d'inutile, comme courir un marathon ou prendre un livre un peu difficile, et passer au travers pour la simple satisfaction de l'avoir fait. Parce que dans la course de fond comme dans la lecture exigeante, on se perd pour mieux se trouver. On y atteint parfois ses limites, qu'on parvient, en de rares moments de grâce, à faire reculer un peu. Ce n'est pas rien. Cela nous permet pendant quelques instants d'échapper à notre condition de travailleur-contribuable-consommateur.
Extraits tirés d'un article de David Desjardins dans L'actualité, 15 septembre 2011.

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